Menu
Panier 0

Banal au collège, mais signe inquiétant à l’hôpital

Publié par Michel Morvan le

Banal au collège, mais signe inquiétant à l’hôpital… Savez-vous de quoi il s’agit ?

Il s’agit du délire !

En langage « jeune », dans la cour du collège, « c’est quoi ce délire ? » pourrait être traduit par « de quoi s’agit-il ? ». Alors qu’en structure psychiatrique, le terme n’est employé qu’avec la plus grande prudence puisqu’il fait référence à une perte du sens de la réalité se traduisant par des convictions fausses, irrationnelles, auxquelles une personne psychotique adhère de façon inébranlable. On l’utilise aussi de façon moins inquiétante pour évoquer une agitation mêlée de paroles incohérentes liée à une forte fièvre.

Et quand il s’agit de qualifier une foule, « en délire », cela peut signifier seulement qu’elle est très enthousiaste ! Dans ce dernier cadre, l’inquiétude peut cependant réapparaître lorsque cette foule s’attaque au cœur des institutions démocratiques, comme cela s’est, vu récemment aux États-Unis… Dès 1895, Gustave Le Bon, dans son ouvrage Psychologie des foules décrivait le comportement spécifique de l’être humain « en foule » :

« Des milliers d’individus séparés peuvent à certains moments, sous l’influence de certaines émotions violentes, un grand événement national par exemple, acquérir les caractères d’une foule psychologique. Il suffira alors qu’un hasard quelconque les réunisse pour que leurs actes revêtent aussitôt les caractères spéciaux aux actes des foules. »

Et il ajoutait, ce qui ne manque pas de faire résonner des situations actuelles :

« Les foules ne connaissant que les sentiments simples et extrêmes ; les opinions, idées et croyances qui leur sont suggérées sont acceptées ou rejetées par elles en bloc, et considérées comme des vérités absolues ou des erreurs non moins absolues. Il en est toujours ainsi des croyances déterminées par voie de suggestion, au lieu d'avoir été engendrées par voie de raisonnement... N'ayant aucun doute sur ce qui est vérité ou erreur et ayant d'autre part la notion claire de sa force, la foule est aussi autoritaire qu’intolérante. L'individu peut supporter la contradiction et la discussion, la foule ne les supporte jamais. »

Dans son puissant roman Porte de sortie, Bénédicte Vidor-Pierre ne s’intéresse qu’à un seul individu, mais nous fait vivre ce que l’on pourrait appeler son délire d’une façon saisissante. Car nous sommes plongés au cœur d’un amour fou, un amour trop grand, trop fort, trop beau pour être vrai. Un amour absolu qui effraie, tant il absorbe la vie, la métamorphose, et fait exploser dangereusement le quotidien. L’écriture libre de Bénédicte Vidor-Pierre épouse le rythme de la pensée de son héroïne, fait la part belle à l’invention et met en forme, symbiotiquement avec son sujet, les méandres inquiétants d’une créativité débridée. Troublés, emportés, témoins bouleversés d’une descente aux enfers pavée d’explosions sensuelles et d’interrogations sur l’essence de la création, nous sommes toujours dans le doute, dans l’espoir, dans le flou, avides de démêler le réel de l’imaginaire, et c’est là que réside un des plaisirs de lecture de ce beau roman souvent trouble, parfois limpide, mais toujours éclairant.


Partager ce message



← Article précédent Article suivant →


Laisser un commentaire

Veuillez noter que les commentaires doivent être approuvés avant leur publication.